Vanités au cochon : « Elle s’affaire. Ses mains glissent sur mon épiderme, ajustent, lui donner un axe, une stabilité fragile. Ça glisse, c’est mou. D’abord, ce n’est qu’un désordre, un amas de chair, un accident sur le bois, une tâche. Puis, lentement, patiemment, elle me redresse.
Je sens la poussée, elle jauge et soupèse. Un tour sur moi-même. Elle ajuste. Ses doigts tâtent les points d’équilibre.

Elle me permet un cou, un rictus, un regard. Quelque chose d’indécis, un œil humide où l’espace se reflète encore un peu. Je suis là, à la limite de tomber.
Elle tourne autour de moi, mesure la lumière qu’elle façonne. Moi, je ne bouge pas et pourtant je suis là, posé sur cette fragile verticale où je ne devrais pas être. Ce n’est pas une image, pas encore. Ce n’est pas une forme, mais une mise en tension.



Je la regarde, sans souffle pour exister, et pourtant je la regarde. Ce n’est plus elle qui me construit, c’est moi qui m’impose à elle, dans cet espace réduit où elle voudrait que je prenne sens. Elle s’éloigne, cadre, attend. La lumière s’épaissit.
Elle appuie.
Vanités au cochon.
Ce travail a été réalisé en 1989 dans le cadre de mon diplôme de troisième année à l’École des Beaux-Arts du Havre. Il s’agissait d’une recherche autour de la nature morte et de la mise en scène d’objets, explorant les notions de photo-sculptures. Peu de négatifs ont été conservés, mais cette série témoignait d’une expérimentation .